Élections territoriales : réponses des candidats aux questions* de U Levante

U Levante a posé trois questions aux candidats aux élections territoriales. Elles sont reproduites ci-dessous ainsi que les trois réponses obtenues.

Madame, Monsieur,

Les 3 et 10 décembre prochain il sera demandé aux électeurs de Corse de faire un choix de société important pour l’avenir de notre Île. La Corse subit, depuis de nombreuses années, une dérive vers une société mafieuse qui se nourrit, notamment, de la spéculation immobilière. Au nom des associations de l’environnement, nous vous demandons de répondre à cette lettre ouverte avant le 27 novembre afin que nul ne puisse ignorer vos propositions sur les points ci-dessous. Nous ferons paraître vos réponses dans la presse et sur le site de U Levante.

1) Pour lutter contre cette spéculation et préserver notre environnement, êtes-vous favorable au maintien, sans modifications, de la loi Littoral ?

2) Le Padduc défend, dans ses grandes orientations, le principe de la nécessité de préserver 105 000 ha d’Espaces Stratégiques Agricoles (ESA) afin d’atteindre, à moyen terme, l’autonomie alimentaire et lutter contre l’artificialisation des terres agricoles qui nourrit, aussi, la spéculation immobilière. Êtes-vous favorable à la défense de ces objectifs et donc au principe, inscrit dans le Padduc, qu’il ne faut pas admettre le changement de destination des ESA ?

3) Dans le cadre de la moralisation de la vie politique, êtes-vous d’accord pour que la responsabilité pénale d’un élu ou du préfet soit engagée si, sciemment et volontairement, ils ont validé un document d’urbanisme en violation de la loi ou d’un jugement définitif ?

Nous vous remercions de bien vouloir nous répondre par retour. Nous rendrons publiques vos réponses.

Réponses reçues (dans l’ordre d’arrivée) :

1 – Réponse de “Core in fronte” (U Rinnovu Naziunali) parue sur Face Book et adressée à U Levante

Pour un PADDUC plus contraignant !

Le débat sur le PADDUC resurgit en cette fin de campagne électorale. Nous avons toujours les mêmes sirènes des adeptes du béton résidentiel. Rinnovu rappelle donc qu’en novembre 2015, à l’Assemblée territoriale, Paul-Félix Benedetti a voté contre le PADDUC le jugeant trop permissif. En effet, l’année précédente, lors d’un vote initial, un consensus politique avait été trouvé. Tout cela a été rompu avec une version finale trop laxiste, notamment en ce qui concerne la protection et la mobilisation des espaces stratégiques agricoles et la défense des espaces remarquables. Nous militons pour un PADDUC plus contraignant, nous souhaitons son renforcement. Nous ne pouvons accepter tout retour de la logique de “désanctuarisation”.
C’est dans ce sens que nous répondons à l’interpellation publique des associations de défense de l’environnement, dont nous saluons le militantisme au service de la terre corse. Pour compléter notre réponse aux associations, nous confirmons que nous sommes hostiles à toute modification laxiste de la loi littoral. De même, les manquements volontaires d’un élu aux dispositions légales en matière d’urbanisme doivent être sanctionnés.

2 – Réponse de  « L’Avenir, la Corse en commun / l’Avvene, a Corsica in cumunu » (la Corse Insoumise, le Parti Communiste et A Manca Alternativa) adressée à U Levante

Objet : questionnaire U LEVANTE

  • Pour lutter contre cette spéculation et préserver notre environnement, êtes-vous favorable au maintien, sans modifications, de la loi Littoral ? 

Nous sommes pour le maintien intégral de la loi littoral. Mais nous ne la confondons pas avec le PADDUC pour lequel nous estimons utile une évaluation concrète qui pourrait exiger une révision..

Nous souhaitons, dans un même mouvement de protection-valorisation de notre patrimoine naturel, que des moyens nouveaux soient accordés au Conservatoire du littoral, notamment pour ses missions de veille foncière, d’acquisition, et de mise en valeur.

Nous souhaitons également que les missions de l’Office foncier de Corse (dont la création résulte de nos propositions) soient mieux précisées : il doit principalement servir à acquérir du foncier pour la construction sociale, en lien avec les collectivités locales ; et non à intervenir dans le domaine du patrimoine architectural, lequel doit bénéficier des aides du budget culturel, non des moyens réservés au logement social. La confusion entre ces deux secteurs essentiels pour la Corse ne peut que desservir l’un et l’autre.

La pression spéculative et ses dérives affairistes, voire mafieuses, ne peuvent être combattues que par une batterie d’outils juridiques associés à une volonté politique forte s’appliquant dans divers domaines: refuser certains avantages fiscaux qui ne profitent que très peu aux petits entrepreneurs mais constituent de véritables aubaines pour les promoteur immobiliers ; soutenir la construction sociale qui permet de faire baisser les prix ; refuser clairement la zone franche (que certains veulent réintroduire en Corse) ; mettre en place des mesures fiscales imposant les gros patrimoines freinera les appétits des prédateurs d’ici et d’ailleurs. Nous avons été bien seuls, jusqu’ici, à proposer des mesures fiscales anti-spéculatives sur les gros patrimoines pour contribuer à financer le logement social, locatif, ou en accession…

  • Le PADDUC défend, dans ses grandes orientations, le principe de la nécessité de préserver 105 000 ha d’Espaces Stratégiques Agricoles (ESA) afin d’atteindre, à moyen terme, l’autonomie alimentaire et lutter contre l’artificialisation des terres agricoles qui nourrit, aussi, la spéculation immobilière. Êtes-vous favorable à la défense de ces objectifs et donc au principe, inscrit dans le PADDUC, qu’il ne faut pas admettre le changement de destination des ESA ?

Préserver les terres agricoles est un principe fondamental. Il doit pouvoir trouver une expression concrète et quantifiée dans un document cartographié pertinent. Votre question introduit une confusion entre un principe (la protection) et sa traduction concrète (105 000 ha).

Ce n’est pas un hasard si les nombreuses remontées du terrain, en particulier de la part des maires en charge du document d’urbanisme de leur commune, expriment des inquiétudes concernant la question très concrète des Espaces stratégiques agricoles (ESA) : ils ont pu constater, sur le territoire de leurs communes, que nombre de parcelles identifiées dans le PADDUC comme « de bonne qualité et à fortes à fortes potentialités agricoles » avaient reçu depuis des années des affectations différentes, y compris dans les documents d’urbanisme locaux.

La contestation principale ne porte pas, selon nos sources, sur l’objectif de préservation des terres dont la vocation est indiscutablement agricole ; elle porte sur les critères d’identification du statut réel, aujourd’hui, de ces espaces. Le document de référence pour le classement de ces parcelles a été la cartographie établie, il y a près de 40 ans, par le bureau SODETEG. Or il est patent que cette carte est loin d’être encore pertinente aujourd’hui. Les exemples d’erreurs manifestes sont légion, associés il est vrai, à certaines revendications moins claires.

Ce qui paraît difficilement contestable, c’est que le total de 105 000 hectares de superficies à sanctuariser manque de crédibilité, car il ne résulte pas d’un examen concret, commune par commune, des terres utilisables pour l’agriculture. Sanctuariser des espaces, dont le caractère stratégique est avéré,est un objectif que tout un chacun doit partager. Et, précisément, c’est la vérification de ce caractère stratégique qui est demandé par ceux que nous avons rencontrés et qui ont pourtant accompagné favorablement l’élaboration du PADDUC et son adoption.

Cette situation est certainement le résultat des surenchères « protectionnistes » qui se sont exprimées à l’Assemblée de Corse par certains qui aujourd’hui constatent la « complexité », voire « l’impossibilité », de la mise en œuvre locale de ce document, Un plan d’aménagement et de développement durable pour la Corse qui s’est voulu plus qu’un document d’urbanisme règlementaire, et un schéma d’aménagement, mais un véritable projet de société, ce que, visiblement, il ne pouvait pas devenir…

Mais, à tout problème correctement exposé, il y a une solution : l’article 4 de la délibération adoptée le 2 octobre 2015 a bien prévu l’évaluation de la mise en œuvre du PADDUC, reprenant ainsi la position que nous avions nous-mêmes exprimée et que nous avons rappelée, le 27 juillet 2017, lors du débat public sur l’évaluation du PADDUC : « Sur une première année, l’évaluation, c’est compréhensible, est limitée, au regard de la consistance des éléments à analyser pour se faire une juste idée de ce qui est positif ou fonctionne et de ce qui, à l’inverse, ne donne pas satisfaction et nécessite des ajustements ou une révision“.

C’est dans cet esprit que nous souhaitons le maintien des grands objectifs de ce document qui a constitué une rupture par rapport au passé. Nous estimons qu’il est du devoir des futurs élus territoriaux de procéder aux vérifications et ajustements que l’expérience acquise aura rendus nécessaires. Si la révision des documents d’urbanisme a été prévue par la loi, c’est justement parce qu’ils sont des documents vivants : ils doivent pouvoir prendre en compte les nouveaux besoins apparus au fur et à mesure de leur mise en œuvre.

  • Dans le cadre de la moralisation de la vie politique, êtes-vous d’accord pour que la responsabilité pénale d’un élu ou du préfet soit engagée si, sciemment et volontairement, ils ont validé un document d’urbanisme en violation de la loi ou d’un jugement définitif ?

L’élu ou le fonctionnaire comme le patron qui ne respecte pas la loi ou une décision de justice (nous l’avons vu de manière éhontée s’agissant du jugement du Tribunal de commerce de Marseille et de la cession de la SNCM) doit en répondre devant la justice.

Aujourd’hui sous couvert “de droit à l’erreur“ le gouvernement tente de mettre sur un plan d’égalité l’erreur administrative de l’usager et le comportement délictueux du décisionnaire qui relève du pénal. Pour ce qui nous concerne, nous y sommes totalement opposés. Inversement nous défendons le principe d’une séparation entre le politique et l’économique, la création d’un véritable statut de l’élu et une remise en cause déterminée des dispositifs dits “d’optimisation fiscale“ et des paradis fiscaux.

3 – Réponse de “Pè a Corsica”, adressée à U Levante