Empêchez-les

Fièvre immobilière. À ce train, l’Île de beauté ne sera plus, bientôt, qu’une île spoliée, définitivement enlaidie, pauvre et désespérée. Qui ne voit ces immeubles, ces maisons, ces murs d’enceinte, crucifiant l’espace de la Sainte liberté des Corses, hier chez eux partout, rétrécissant l’espace et les voies, occultant les vues mer ou montagne, privatisant le commun, déracinant des oliviers centenaires, mitant l’espace au mépris de l’esthétique et du risque d’incendie. Comment ignorer ces agglomérations rampantes, sur les terres productrices, nourricières, repoussant, regroupant, les locaux dans leur logement social, fièrement octroyé en compensation, par des municipalités distribuant par ailleurs, à tour de bras, ces permis d’enlaidir sans même un cahier des charges et permettant à tel électeur ou groupe de pression géophage de s’enrichir individuellement, contribuant ainsi à nous appauvrir collectivement.

Un seul mandat de six ans suffit à enlaidir pour six mille ans et plus ! Certains ne s’en privent pas ! Pesantes prérogatives dévolues à l’élu, seul décideur, pas toujours visionnaire, pas toujours libre non plus.
Pourquoi font-ils tout ça ? Au nom d’un « développement » ici redéfini, répondent sincèrement et béatement certains maires ignorant que nous sommes entrés dans la postmodernité. Rendez-vous pour l’inventaire !
La Corse s’achète sur internet et se loue à l’abri du fisc. On participe à l’inflation du foncier, à l’enlaidissement du paysage, à la déstructuration de notre imaginaire, à la perte de notre identité, à notre assujettissement, à notre souffrance collective source de tourments jamais prise en compte. Face à cette irréversible blessure, que ceux qui se réjouissent se lèvent !
Certains pays ont compris combien préserver était source de richesse pérenne. Chez nous, le Ici et maintenant est le leitmotiv compulsif. Carpe diem. Nos enfants pourront toujours devenir gardiens de villas, laveurs de piscine.
À l’instar de Stéphane Hessel «Indignez-vous !», ajoutons dans un cri : «empêchez-les !»