U Levante : action citoyenne continue !

1986 / 2016 :  30 ans de lutte citoyenne!

  • 1986 : un projet d’urbanisation, avec modification du POS, de la haute vallée de la Restonica, voit le jour. Il semble tellement aberrant (épuration impossible, inaccessibilité l’hiver, pollution de la rivière) que U Levante est créé. Une action au TA annule la modification du POS … Ce fut une première victoire et l’indication d’une voie possible pour les citoyens.
  • 2016 : U Levante a gardé le même credo : l’application du Droit et des lois.

Les lois du code de l’environnement sont bien écrites !

C’est en 1986 que la Loi « Littoral » est votée. Cette loi est importante pour la Corse, car si son littoral est encore préservé, du fait de son histoire, de sa faible démographie et de son éloignement, il est déjà l’objet, depuis les années 60, de convoitises et de spéculations.

U Levante et ABCDE comprennent très vite que la Loi Littoral est un atout majeur pour la protection de la Corse. Elle sera leur levier d’action, un levier pacifique, non violent mais extrêmement efficace … si la loi avait été appliquée.

En parallèle, depuis 30 ans, U Levante :

–  lutte contre les décharges sauvages et les incinérateurs, dont celui de Venacu,

–  tente de faire prendre en compte la pollution atmosphérique et dénonce les rejets très toxiques de la centrale du Vaziu,

–  est vigilant sur la protection des rivières,

–  demande l’application de la non-constructibilité des zones inondables,

–  participe à de nombreuses enquêtes publiques, des actions éducatives…..

Et, si U Levante dérange, le nombre de ses adhérents augmente régulièrement !

On dit que U levante empêche le « développement » !

Mais quel développement ? Celui des villas ou hôtels « les pieds dans l’eau » ? Celui de la privatisation du littoral au bénéfice des plus nantis ? Celui de l’urbanisation des terres agricoles de bonnes potentialités ? Il est vrai qu’U Levante n’a jamais voulu de ce « développement » là !

On dit que U Levante a « l’indignation sélective » !

U Levante n’est qu’une association (et non une administration) de militants, seulement armés de leur bénévolat. Il lui est difficile de connaître et traiter les milliers de permis de construire annuels. Il faudrait, pour cela, examiner chaque semaine les panneaux d’affichage de toutes les communes de Corse, sachant que les fameux « permis tacites », généralement les plus illégaux, ne sont jamais affichés ! Bien sûr, cela eut été souhaitable, mais ce n’était humainement pas POSSIBLE.

Alors, la sélection des dossiers connus, oui U Levante l’a pratiquée. Simplement parce qu’il y en avait tellement, que leur nombre dépassait nos capacités de traitement.

Chaque semaine, U Levante reçoit une lettre, anonyme ou non, qui dénonce un projet sur une commune ! Au forum de RCFM, un intervenant a demandé un jour, à propos des constructions au col de San Stefanu, « mais que fait U Levante ? »……… Hélas, U Levante n’est pas Zorro…

Quelle fut la stratégie de U Levante, durant toutes ces années ?

Notre choix fut de déférer devant la justice le maximum de Plans Locaux d’Urba-nisme (PLU) ou Cartes Communales (CC) illégaux, afin de rendre inconstructibles des pans de territoire, en demandant simplement l’application des lois.

La justice administrative (du TA au Conseil d’État) a quasiment toujours validé les requêtes de U Levante et les documents d’urbanisme déférés sont « tombés », les uns après les autres, faisant grand bruit…. Comment et de quel droit, quelques malotrus osaient-ils s’attaquer aux décisions des maires, « élus du peuple » chargés, en théorie, d’appliquer les lois ?…. Un fossé s’installa.

Tout document d’urbanisme est soumis au contrôle de légalité de l’État. Les annulations prononcées par la justice ont mis en évidence les graves manquements des préfets (car les services de l’État, eux, avaient dénoncé ces illégalités). Ainsi, quand U Levante fait annuler 20 PLU/CC non déférés par l’État, on doit conclure que l’Etat ne voulait pas que la Loi Littoral soit appliquée dans l’île : l’occupation du littoral par essentiellement des milliers de résidences secondaires, de non-résidents, était, et est toujours, la politique de l’État en Corse.

Afin de poursuivre cette politique, les Préfets, de Corse-du-Sud essentiellement,  passèrent outre les décisions de justice et accordèrent des centaines de permis de construire (PC) sur des zonages déclarés inconstructibles par jugements. Un Préfet, en poste, nous déclara même « ne pas être lié par les décisions de justice ». Incroyable mais très réel et scandaleux !

L’action associative a ses limites !

U Levante, avec d’autres, a tenté de protéger le littoral en demandant seulement l’application des lois, mais n’a malheureusement pas réussi….Les rouleaux compresseurs, que sont certains maires et l’État, ont fonctionné et fonctionnent toujours. Les plages privées se sont multipliées, certains pans de DPM sont inaccessibles, le pourcentage des résidences secondaires de nombreuses communes dépasse largement leurs capacités d’accueil…

Et les PADDUC  (Plans d’Aménagement et de Développement Durable de la Corse) dans tout ça ?

  • Dès 1982, un nouveau « statut » offre aux élus corses la possibilité d’élaborer leur propre schéma d’aménagement, donc de définir les zones à urbaniser et les zones à protéger. Mais ils ne l’ont pas fait et c’est l’État qui, en 1992, se substitue à eux et publie un Schéma d’Aménagement de la Corse (SAC) réellement protecteur, ayant valeur de directive territoriale d’aménagement et qui prévaudra jusqu’en 2015, au grand dam des bétonneurs. Ce fut une grande chance pour la Corse !
  • En 1997, la majorité au pouvoir tente de rédiger son propre SAC. Heureu-sement ce projet, qui aurait autorisé des hôtels trois étoiles dans des bandes des 100 mètres, vierges de toute autre construction, ne verra pas le jour : les associations de défense de l’environnement, devant un tel projet, créent en 1998 le Collectif pour la Loi Littoral (CLL) auquel adhère une trentaine d’organisations.

Ce collectif bataillera et gagnera, puisque ce SAC sera rejeté.

  • En 2000, débute le processus Matignon qui envisage un statut particulier à la Corse et le pouvoir de maîtriser l’organisation de son espace en dérogeant à la Loi Littoral. À nouveau la mobilisation des acteurs du CLL empêche que l’aspect très nocif de ce projet soit retenu : la Loi Littoral reste totalement applicable. Et la démocratie sort gagnante, puisqu’un sondage de janvier 2002, en Corse, démontre que 81% des sondés souhaitent que la Loi Littoral continue à s’appliquer en Corse !
  • La loi de 2002 permet à la Collectivité Territoriale de Corse (CTC) de réaliser son PADDUC. Le Préfet de l’époque fait réaliser par ses services un atlas des Espaces Remarquables et Caractéristiques (ERC). Une deuxième grande chance pour la Corse ! Les élus majoritaires de la CTC, en place en 2004, travaillent à un PADDUC… à leur manière (à leurs mains) où des déclassements d’ERC sont directement superposables à des projets immobiliers de grande envergure. Là encore, le CLL intervient avec force et… l’Exécutif est contraint de retirer « son » PADDUC.
  • A partir de 2010, la CTC devra appliquer la Loi du 5 décembre 2011, relative au PADDUC. Le début des travaux est prometteur et U Levante participe activement aux assises du littoral comme aux assises du foncier. Le bilan, voté fin 2015, ne tiendra pas toutes ses promesses en raison de zones restées floues : les ERC sont très mal limités (le trait correspond à une bande de 100 m sur le terrain et les ZNIEFF 1 ne sont plus inconstructibles) tandis que la perte d’Espaces Stratégiques Agricoles (ESA) pourra être compensée par des terrains non classés en ESA. La permissivité offerte est déjà visible dans les PLU en préparation. L’État, dont on connaît la politique, s’est engouffré dans la brèche : les cartes des ERC qu’Il applique ont tout simplement gommé les surfaces incluses dans le trait limitant les ERC : ainsi il tente de faire disparaître la protection de milliers d’hectares littoraux. Quant aux ESA, l’agence de l’urbanisme semble approuver, elle, des compensations que nous jugeons très douteuses.

Rien n’est jamais acquis !

L’opposition entre deux types de « développement » reste d’actualité. L’urbanisation du littoral corse est un enjeu politique majeur qui dépasse, et de loin, le seul prisme environnemental. U Levante, mais aussi U Polpu, ABCDE, le GARDE, des organisations politiques, des syndicats, des groupes culturels et de simples citoyens, ont tenté, dans un cadre pacifique, d’agir pour le bien public et la protection de la terre en demandant tout simplement l’application des lois. Cette quête s’est révélée révolutionnaire et n’a pas été couronnée de succès ! Aujourd’hui la mafia est installée en Corse et les plus forts construisent ce qu’ils veulent, où ils veulent… car aucune démolition n’interviendra, schéma d’aménagement en place ou pas.

L’action citoyenne doit continuer !

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