Pollution aux métaux lourds. Des millions de cartouches de chasse usagées laissées dans le maquis

La fermeture de la Chasse, prévue en février, va priver un homme sur cinq d’une activité qui les passionne. Mais qui songe, que les munitions laissées sur place contiennent des métaux lourds : du plomb, du mercure, de l’uranium, de l’arsenic… Ces substances toxiques occasionnent des dommages, sérieux, sur l’environnement et une mortalité accrue de la faune sauvage. À Bisinchi, la petite association locale a pris le problème à bras le corps.
Les cartouches à grenailles de plomb sont responsables d’intoxications et d’un nombre conséquent de cas de saturnisme aviaire. Elles constituent alors une contamination de la chaîne alimentaire et de l’eau. Nous sommes tous concernés ! Pourtant, chaque année, des millions de munitions sont abandonnés, polluant les habitats naturels et les nappes phréatiques.

Depuis 2006, les bénévoles de U Cavallu di Bisinchi ramassent et collectent les cartouches usagées. Une volonté de protéger le patrimoine et puis, explique la présidente : « Il est fort désagréable, quand on se promène, de voir les chemins jonchés par ces déchets. Certains réflexes seraient de bon augure », poursuit-elle avant d’ajouter ” Tout le monde peut profiter de sa passion sans pour autant négliger l’environnement”.

Collecter les munitions au nom de la santé, de la nature, des paysages, du bon sens tout simplement s’est alors avéré un vrai casse-tête. L’association s’est trouvée bien seule. Où stocker toute cette pollution ? Il doit bien y avoir une manière de valoriser sa matière première se sont inquiétés les responsables de l’association qui, tout naturellement, se sont tournés vers les organismes publics. Mais, ni l’Office de l’environnement de la Corse, ni l’Ademe, ni même la Fédération départementale de la Chasse (pourtant première concernée) n’a pris la question au sérieux. En l’absence de réponse, U Cavallu di Bisinchi s’est tourné vers le ministère de l’Écologie. Sans plus de succès.

Mais pas question d’abandonner. À force d’opiniâtreté, c’est finalement auprès de la fédération interdépartementale des chasseurs de l’Essonne, du Val d’Oise et des Yvelines que des solutions concrètes ont pu être trouvées pour le recyclage de ce type de déchet. Forte de ce soutien, l’Association a donc contacté la société Recytechnic en Meurthe et Moselle, dont l’activité est caractérisée par le traitement de déchets particuliers et notamment les cartouches de chasse.

C’est ainsi qu’en avril 2008, 50 kg de cartouches ont pu être expédiés sur le continent pour être revalorisés : la collecte de trois années. Cette opération a été renouvelée cette année avec l’envoi de 17 kg.  Financièrement, l’action n’a été rendue possible que grâce au soutien technique de La Poste que les responsables de l’association ont su convaincre de prendre en charge le coût de l’affranchissement.

Aujourd’hui certains chasseurs rapportent leurs cartouches, sinon ce sont les promeneurs qui les ramassent au grès de leur balade. L’association envisage d’entreposer des bacs récupérateurs sur les sites de regroupement des chasseurs sur la commune, afin de les sensibiliser davantage encore à ramener leurs cartouches usagées. « Mais les mentalités sont difficiles à faire évoluer, il n’y a pas autant de campagnes de sensibilisation auprès du public que pour les autres déchets ménagers » note, sceptique, la cheville ouvrière de l’association.

Rappelons qu’une cartouche moyenne contient 200 à 300 billes de plomb soit 30 à 35 g de plomb toxique. Si chaque chasseur en Corse (il y en a 17 000) ne tirait que dix cartouches par an, ce serait déjà 5 tonnes par an plomb toxique dispersés dans l’environnement. On estimait dans les années 1990 qu’en France 250 millions de cartouches étaient tirées annuellement dont 75% pour la chasse (soit environ 6 500 tonnes/an de plomb) et 25 % pour le ball-trap (plus de 2 000 tonnes/an).