Brandu, Cap Corse : villa en ERC, dans la bande des 100 mètres, en zone non urbaine

Sur l’espace remarquable n° 2B18 théoriquement inconstructible du littoral de la commune de Brandu, côte orientale du Cap Corse, se dresse une nouvelle villa, à moins de 100 mètres du rivage. Un permis de construire a bien été accordé : le n° 02B 043 16 N0019, délivré le 28/07/2016, sur la parcelle 1140.

Localisation dans l’espace remarquable 2B18 :

Dans les communes littorales, conformément à l’articleL 121.8 (ancien L. 146-4 I du code de l’urbanisme),  l’extension de l’urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement.

Ainsi, seules peuvent être autorisées “les constructions en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu’aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d’autres constructions, dans les zones d’urbanisation diffuse éloignées des agglomérations” (CE, 27 septembre 2006, Commune du Lavandou, n° 275924). Les nouvelles constructions dans les secteurs mités sont donc interdites, des constructions éparses ne pouvant servir de point d’accroche à de nouvelles constructions.

Dès 2011, alors que la parcelle n’est pas construite, elle est incluse dans un zonage Uds, constructible, du PLU arrêté. Zonage illégal en application de la loi Littoral puisquil s’agit d’une « zone d’urbanisation diffuse », zone non urbaine donc, et d’un ERC comme l’ont alors souligné les services de l’État : 

« L’examen du zonage fait apparaître que des zones constructibles sont définies dans des espaces remarquables soumis à l’application de l’article L. 146.6 du code de l’urbanisme (loi Littoral). Même si les zones constructibles reprennent les périmètres U et NA du POS, celles-ci sont non conformes à la loi Littoral ; leur reconduction éventuelle suppose le respect des règles de la loi et une justification au cas par cas. … Au lieu-dit Sacro dans les parties nord et sud zone UdS non urbanisée… Ces espaces sont à reclasser en N …»

Malgré cet avis explicite des services de l’État, le zonage Uds est resté sur le PLU approuvé en 2011… que le Préfet n’a pas déféré au tribunal administratif.

En l’espèce, l’illégalité du zonage Ud admis par l’État dans ses observations, tient à trois éléments :

– le secteur concerné n’est pas une zone urbaine,

– le secteur concerné se trouve partiellement dans la bande des 100 mètres,

– il relève d’un espace remarquable, par nature inconstructible.

À chaque fois, à Brandu comme à Siscu, le préfet applique le PLU même si le zonage est à l’évidence illégal.

Sans exonérer le maire de ses lourdes responsabilités, la carence de l’État est double :

– il aurait dû déférer le zonage illégal au TA au moment de l’adoption du PLU,

– il aurait dû déférer le permis illégal en 2016.

Car, pour les juges administratifs :

  • « La circonstance que le terrain d’assiette soit classé en zone constructible du plan d’occupation des sols de la commune est sans influence sur l’appréciation de la légalité du permis attaqué au regard des dispositions particulières au littoral du code de l’urbanisme. » CE, 31/03/2017,  et Mme Beauvais, n° 396 938
  • « La circonstance que les auteurs du règlement local d’urbanisme disposent d’un délai de 3 ans pour rendre compatible leur document avec le Padduc ne fait pas obstacle, dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire, à l’application de ce dernier. » CE, 31 mars 2017, n° 396938 et 392686) et TA Bastia, 16 mars 2017, n° 1600730 et 1600954, Mme Marlot & autres
  • Lorsque le permis de construire attaqué méconnaît les dispositions de la loi littoral relatives aux espaces proches du rivage telles que précisées par le PADDUC, qu’il ne se situe pas en continuité d’un espace urbanisé au sens des dispositions précitées de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme telles qu’éclairées par le PADDUC alors applicables, le PC est illégal. TA Bastia.

C’est en fonction de ce zonage Uds que le permis M a été  accordé par le maire en 2016 et n’a pas été déféré par l’État, considérant que le PC accordé par le maire était en accord avec le PLU !

Fort heureusement tous les PLU doivent être mis en conformité avec le padduc en novembre 2018 mais que de dégâts dans le paysage en attendant !