Et le “parpaing d’or” est attribué à…

 

C’est désormais officiel : dans son jugement* rendu ce jeudi 17 février 2022, le tribunal administratif de Bastia a demandé à la commune de Bonifacio d’abroger son PLU (Plan local d’urbanisme) dans les trois mois. Il a jugé que le classement en zones constructibles de plus de 1 000 hectares de terrains était déséquilibré, car permettant une augmentation potentielle de 60 % de la population de la commune de Bonifacio, alors que celle-ci n’a crû que de 11 % en 10 ans. Il a ainsi estimé qu’en ouvrant à l’urbanisation de vastes secteurs de la commune, le long du littoral et autour de hameaux à l’habitat limité et dispersé, les auteurs du PLU ont favorisé un mitage qui ne permet pas d’atteindre les objectifs de développement durable prescrits par la loi. De très nombreux classements en zones constructibles prévus par le PLU sont contraires au code de l’urbanisme.

Le tribunal a donc entièrement validé l’avis du Rapporteur public formulé à l’audience du 3 février 2022 : l’association U Levante était fondée à soutenir que le Plan local d’urbanisme (PLU) de Bunifaziu adopté en 2006 est illégal.

Le Maire, l’adjoint en charge de l’urbanisme, tous les services de l’État avaient connaissance de l’illégalité de ce plan depuis … 2006, année de son adoption. Le Conseil municipal a eu 15 ans pour l’abroger… mais ne l’a pas fait. Mis en chantier en 2013, le projet d’un nouveau PLU n’a pas abouti…

Fort heureusement, l’association ABCDE avait déféré une partie de ce PLU et obtenu l’annulation en 2010 de plusieurs zonages littoraux. Ce PLU illégal d’ouest en est et du nord au sud n’a pas non plus été mis en compatibilité avec le PADDUC (elle aurait dû être effective fin 2018). Son application pendant 15 ans a pour conséquence un mitage extrêmement important du territoire bonifacien, la perte d’espaces stratégiques agricoles, le saccage de paysages exceptionnels, l’inaccessibilité à de grandes portions du domaine public maritime occupé par des résidences secondaires luxueuses les pieds dans l’eau.

Exemple : les villas Perrino/Krzentowsky en 2020 – PC accordé le 10/02/2015 sur un zonage illégal

Le Conseil municipal doit donc être saisi et le PLU actuel doit être abrogé. En attendant qu’un nouveau PLU compatible avec les lois de l’urbanisme et le Padduc soit élaboré, la commune sera soumise au Règlement national d’Urbanisme (RNU).

U Levante décerne au maire de Bunifaziu et à l’adjoint en charge de l’urbanisme un parpaing d’or. 

Les illégalités retenues :

*Jugement :

 – incompatibilité avec les dispositions des articles L. 101-1 et L. 101-2 du code de l’urbanisme tel que précisés par le PADDUC : l’ouverture à l’urbanisation opérée par la commune doit être en rapport avec ses perspectives de développement et ne pas constituer une offre de terrains à bâtir démesurée : c’est le “principe d’équilibre”). Selon le TA, les zones constructibles résultant du plan local d’urbanisme litigieux applicable à la date du présent jugement recouvrant les zones U, AU, NNH, NL1 et NL2 représentent une surface totale de 1 083 hectares, dont 796 hectares non construits. Dès lors, eu égard au taux de rétention foncière applicable aux communes rurales dont Bonifacio fait partie, à la surface moyenne d’un terrain de 1 200 m2 par logement et à la taille moyenne des ménages de cette commune en 2018, de 2,3 personnes, l’ensemble des zones constructibles précitées créées par le plan local d’urbanisme permettent d’accueillir 10 500 habitants supplémentaires, soit une augmentation de 60 % de la population de la commune de Bonifacio recensée en 2008. Dès lors, l’association U Levante est fondée à soutenir qu’il existe une disproportion manifeste entre les possibilités de construction offertes par le plan local d’urbanisme litigieux et les besoins en logements dans la commune de Bonifacio. En outre, en dépit de la surface totale des zones constructibles, qui se limite à 7 % de la superficie du territoire communal, en ouvrant à l’urbanisation de vastes secteurs de la commune, le long du littoral et autour de hameaux à l’habitat limité et dispersé, les auteurs du plan local d’urbanisme litigieux ont favorisé un mitage qui ne permet pas d’atteindre les objectifs de développement durable de l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme. Ainsi, le moyen tiré de l’incompatibilité entre ce plan et les dispositions précitées doit être accueilli.

 – incompatibilité avec les prescriptions du plan d’aménagement et de développement durable de Corse relatives aux espaces stratégiques agricoles ; 168 hectares, soit plus de 14 % de la surface totale des espaces stratégiques agricoles de la commune sont ouverts à l’urbanisation

 – méconnaissance de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme précisé par le PADDUC (l’extension de l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les agglomérations et les villages existants). le TA a représenté sur les cartes du PLU abrogé toutes les zones illégales.

 – méconnaissance de l’article L. 121-13 du code de l’urbanisme ( l’extension de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage doit rester limitée).

– méconnaissance de l’article L. 121-16 du code de l’urbanisme (en dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux (…) : Sperone, Cala Longa, Cavallo sont concernés.

méconnaissance de l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme : les sites ou les paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentant un intérêt écologique doivent être préservés. Le classement en zone constructible du plan local d’urbanisme de nombreux secteurs (Cavallo, Rondinara), en tant qu’ils se situent dans la bande littorale de 100 mètres, n’est pas compatible avec les dispositions précitées de l’article L. 121-23 du code de l’urbanisme telles que précisées par le PADDUC. Sperone, La Catenna, Rondinara, Cavallo sont concernés.