La disparition du palmier en Corse est programmée

Les palmiers de Corse sont condamnés, la faute au charançon rouge, un coléoptère particulièrement vorace. Réussir l’éradication de cet insecte nécessite que tout le monde traite sa plante infestée. Quand il n’y aura plus de palmier, l’insecte va vraisemblablement se satisfaire d’une autre espèce.

En Corse, aux abords des principales villes et dans les jardins des particuliers, il est désormais courant d’observer ses funestes silhouettes. Le palmier colonisé, constitué de palmes centrales, normalement dressé à la verticale se désaxe peu à peu. Progressivement, il présente un aspect général comme aplati puis les palmes desséchées tombent. La mort de la plante est irrémédiable.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Profitant des échanges commerciaux (importation des palmiers ornementaux), le charançon rouge du palmier, insecte originaire des régions d’Asie, colonise les palmiers insulaires depuis 2006. Ce coléoptère, particulièrement vorace et puissant, est capable de voler pendant 1 h 30 mn et peut parcourir 40 kilomètres d’un seul tenant. Il tue un par un les palmiers de l’île.

Au printemps, il se déplace en volant et se reproduit en pondant des œufs par centaines (couleur jaune clair) qu’il dépose au niveau des palmes centrales de la tête du palmier. Les larves mangent alors les fibres du palmier. Puis les adultes qui émergent au bout de 14 et 21 jours partent coloniser d’autres végétaux.

L’insecte s’attaque aux variétés de palmier présentes en Corse dont les plus sensibles : le palmier dattier et le palmier des Canaries. Espèces végétales non endémiques, les palmiers occupent néanmoins une place importante. Très présents dans les paysages côtiers insulaires, ils ornent les plus beaux sites urbains (place du diamant, place Saint Nicolas, etc.) Leur destruction a déjà des répercussions paysagères irréversibles, elle représente une perte patrimoniale et écologique et aura des conséquences économiques lourdes.

Cet insecte de la famille des curculionidés mesure de 3 à 4 centimètres à sa taille adulte. Il peut être de plusieurs couleurs du brun orangé au noir en passant par le rouge. Le thorax présente des taches noires et au niveau de la tête, l’adulte expose un rostre (pièce buccale allongée) caractéristique, velu pour les mâles et glabre pour les femelles.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lutter. L’arrêté ministériel du 21 juillet 2010 rend la lutte obligatoire  sur le territoire national, il stipule que ” lorsque la présence de Rhynchophorus ferrugineus est confirmée sur un végétal, le propriétaire a l’obligation, dans un délai de quinze jours ouvrés suivant la notification officielle par les services chargés de la protection des végétaux, de faire procéder à l’éradication de l’organisme nuisible ».

L’arrêté préfectoral en date du 8 février 2013 fixe en Haute-Corse un périmètre de lutte contre le charançon rouge, trois zones sont déterminées : une zone contaminée, une zone de sécurité et une zone tampon. L’objectif principal étant d’éviter la propagation de l’espèce.

 

Les palmiers ne sont pas des arbres, mais des herbes géantes. Leur tige non ramifiée (le stipe) est surmontée d’un bouquet de feuilles pennées ou palmées.

 

En préventif, il est nécessaire de traiter une fois par mois, de mars à novembre inclus, ce qui correspond à la période d’envol de l’insecte. Pour un meilleur contrôle visuel de la zone infestée, il est conseillé de créer une fenêtre d’observation en enlevant une partie du feuillage. Selon le stade de développement de l’insecte et pour des périodes données il est possible de répéter l’application.

Des traitements 100% biologiques à base de nématodes entomopathogènes apparaissent efficaces. Des produits chimiques à base d’imidaclopride peuvent également être utilisés1. En Costa Verde et en Plaine orientale, on pratique l’endothérapie végétale (injection d’un produit directement dans le système vasculaire de la plante) pour stopper l’infestation.

En curatif, la technique utilisée dépend du degré d’infestation. Elle permet de sauver le palmier à la condition que le bourgeon terminal n’ait pas encore été dévoré. On parle d’assainissement, la méthode consiste à éliminer mécaniquement tous les tissus contaminés en taillant les palmes et en se débarrassant de la partie infestée du stipe (le tronc). Une fois le palmier traité, il est suivi de près et le traitement préventif prend alors le relais.

Les traitements doivent être exécutés par des entreprises qui ont suivi des formations spécifiques reconnues et dont la liste est disponible auprès de la Chambre d’agriculture et du service des espaces verts. La Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles de Corse est à l’origine de la localisation du ravageur sur l’île; elle a réalisé un suivi de l’infestation par piégeage phéromone et propose sur son site, entre autres, un document technique sur les moyens de lutte.

Réussir l’éradication de cet insecte nécessite que tout le monde se mobilise et traite sa plante infestée. Il y a urgence, quand il n’y aura plus de palmier, l’insecte encore présent va vraisemblablement se satisfaire d’une autre espèce.

 

 

1. L’utilisation par pulvérisation de produits chimiques dans les zones urbanisées n’est pas sans danger, selon le premier adjoint au maire de Nice, Benoît Kandel, initiateur de la lutte contre le charançon dans la région niçoise, « le produit chimique employé dans le cadre de l’endothérapie ne traite pas que le charançon : il a des effets sur la flore et la faune, y compris sur l’homme». La ville de Nice a par ailleurs, selon le principe de précaution, privilégié la lutte biologique.