Le sentier littoral de Murtoli prend le maquis- Deuxième partie

L’arrêté préfectoral approuvant la tranche 2 du sentier littoral à Murtoli est traduit par une carte qui montre que la servitude de passage est suspendue devant le restaurant « la Table de la Plage » (mais l’image est coupée et ne montre pas ce restaurant …). Cette « suspension » , située sur le sable du domaine public maritime, est représentée par un trait pointillé rose.

Cette “suspension” de la servitude est-elle légale ? Un quidam peut-il quand même passer en restant dans son bon droit?

L’arrêté préfectoral la justifie ainsi :

Est-ce exact?

La suspension de la servitude se situe exactement sur la portion de plage située en face du restaurant “La Table de la Plage” du domaine de Murtoli, restaurant qui a fait l’objet :

  • d’une première plainte de U Levante pour construction sans permis,
  • d’une deuxième plainte pour non-respect de l’arrêté de biotope en vigueur sur ce site,
  • d’une mise en demeure de la DREAL.

La suspension de la servitude se situe exactement sur la portion de plage (DPM) que le domaine de Murtoli utilise pour y organiser plusieurs fois par an des festivités rassemblant plusieurs centaines de personnes (concerts, mariages, etc.). L’embouchure proprement dite est un peu géographiquement variable mais est, au moins pendant tout l’été, étroite et très peu profonde, ce qui la rend franchissable sans danger à pied. De nombreuses vidéos publiées sur internet le montrent. Le fait n’est pas contestable. Plusieurs vidéos montrent même une table de restaurant installée dans le lit de l’embouchure!

Conclusions : le tracé de la servitude serait impossible là où la plage est utilisée à titre privé pendant des mois par des centaines de personnes ?

Que dit la loi ?

Le Conseil d’État a posé le 29 06 2020 :
10. “… les dispositions de l’article L. 160-6 du code de l’urbanisme (devenu L121-31) instituent un droit de passage le long du littoral au profit des piétons. Dès lors, ainsi qu’il résulte d’ailleurs des termes mêmes du b) de cet article, la suspension de la servitude de passage sur certaines portions du littoral ne saurait être qu’exceptionnelle. Dans l’hypothèse prévue par les dispositions précitées du e) de l’article R. 160-12 du code de l’urbanisme, l’administration ne peut légalement décider de suspendre, jusqu’à nouvel ordre, la servitude, que si elle justifie que ni la définition de la servitude dans les conditions prévues par l’article R. 160-8 du code, ni une modification de son tracé ou de ses caractéristiques dans les conditions et limites prévues par la loi, ne peuvent, même après la réalisation des travaux qu’implique la mise en état du site pour assurer le libre passage et la sécurité des piétons mentionnés à l’article R. 160-25 du code, garantir la conservation d’un site à protéger pour des raisons d’ordre écologique ou archéologique, ou, dans l’intérêt tant de la sécurité publique que de la préservation des équilibres naturels et écologiques, la stabilité des sols.” 

Donc, pour suspendre la servitude, il faut que : 

– soit le passage est impossible à cause du danger : à l’évidence il n’existe pas,

– soit il est dangereux ou il y a un intérêt écologique et archéologique  : il faut encore que le détour soit impossible, même malgré des travaux.

Évidemment, aucune de ces conditions n’est réunie en l’espèce. En conséquence, U Levante va déférer cet arrêté préfectoral devant le Tribunal administratif de Bastia.